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[Disparition] Décès d'Etienne Guyon

Recherche Article publié le 13 septembre 2023 , mis à jour le 26 septembre 2023

Ancien professeur à l’Université de Paris-Sud 11 (réintégrée en 2020 dans l'Université Paris-Saclay), Etienne Guyon s’est éteint le 13 juillet dernier à l’âge de 88 ans. Il restera l’une des figures majeures de la recherche sur les instabilités, le chaos et la turbulence.

Son parcours restera intimement lié à l’Université. Après ses études à l’Ecole Normale Supérieure (ENS), Etienne Guyon entreprend en 1961 une thèse au Laboratoire de Physique des Solides (LPS), situé alors sur le campus d’Orsay au bâtiment 210 dans la vallée, qu’il conclura en 1964.  Le sujet : la supraconductivité (conduction électrique sans résistance à très basse température). Premier thésard de Pierre-Gilles de Gennes (prix Nobel de physique 1991), il part aux Etats-Unis, au sein de l’Université de Californie, afin de travailler sur l'hélium superfluide, s'écoulant sans viscosité à très basse température. Il reçoit en le prix Ancel de la Société Française de Physique, en récompense de ses travaux. Une partie de ses expériences a également inspiré la théorie de John Kosterlitz et David Thouless, récompensés en 2016 par le prix Nobel de physique.

A la fin des années 60, il retourne en France pour rejoindre le Laboratoire de physique des Solides (LPS). Il y participe à la nouvelle activité initiée par Pierre Gilles de Gennes sur les cristaux liquides, et plus particulièrement sur les instabilités de cristaux liquides nématiques dues à une différence de température ou à un écoulement. Ses travaux, réalisés notamment en collaboration avec Pawel Pieranski, en font une référence internationale.

En 1972, sa carrière prend un tournant : il devient professeur, tout d’abord à l’Université Paris-Sud 11 en 1972, puis à l’ESPCI en 1978, dont Pierre-Gilles de Gennes a pris la direction deux années plus tôt. Il participe alors à la création d’un laboratoire de recherche en hydrodynamique, tout en continuant parallèlement son activité d’enseignant à Orsay jusqu’à la fin des années 80. Durant cette décennie, il a notamment enseigné au DEA de Physique des Liquides. Il a également impulsé de nombreuses créations de Travaux Pratiques (TP) à Orsay, en s’appuyant sur les résultats de recherche de ses collègues du LPS comme la diffraction de lumière par des cristaux colloïdaux avec Brigitte Pansu, ou encore un atelier de mécanique performant constitué de Patrice Jenffer pour la conception et Gilles Marteau pour la fabrication. Il avait également participé à la création au début des années 1990 de l’option de Découverte de la mécanique des fluides, qui a débouché sur de nombreux projets expérimentaux des étudiants en 2ème année universitaire de physique. Il a aussi organisé des stages de formation “Armoire de Physique” (Tiroir Sciences de la Matière) via la Conférence Internationale des Responsables des Universités et Institutions à dominante Scientifique et technique d’Expression Française (CIRUISEF). En ont notamment découlé un stage en 2012 avec 24 participants enseignants originaires de différents pays d’Afrique pour prendre part à  des TP d’hydrodynamique, mais aussi une expérience d’imbibition / fluidisation / sédimentation de sable par de l’eau, mise en place avec le laboratoire FAST dans le cadre d’un stage au Sénégal en 2015.

Sa carrière prend un nouvel essor en 1988, année qui le voit devenir directeur du Palais de la Découverte, avant de prendre les rênes de l’ENS de 1990 à 2000.

Il laisse également derrière lui une belle carrière d’écrivain. Il a en effet rédigé de nombreux ouvrages, tant pour un public spécialisé, principalement étudiant, que pour un public large, dans une volonté de vulgarisation. Parmi ses réalisations, figure « Exploration de la matière - Structures et propriétés » (De Boeck, 1995), écrit avec Claudine Betrencourt et Jean-Claude Deroche, tous deux Maîtres de Conférence à la Faculté des Sciences d’Orsay, ou bien « Hydrodynamique physique » (1991), co-écrit avec Luc Petit et Jean-Pierre Hulin, ouvrage de référence pour les étudiants de Master et Doctorat du domaine, qui a connu une troisième édition en 2012 et des traductions en anglais, allemand et, tout récemment, chinois. D’autres ouvrages sont devenus des références : « Granites et fumées, un peu d'ordre dans le mélange » (Odile Jacob, 1997), « Ce que disent les fluides » (Belin, 2005) ou « La matière en désordre » (CNRS Éditions / EDP Sciences, 2014), en collaboration notamment avec Jean-Pierre Hulin, directeur de recherche CNRS au laboratoire FAST (Orsay). A l’automne 2022, il sort son ultime publication, « L’impermanence du monde - la physique du l’éphémère », qu’il a co-écrit avec Jean-Pierre Hulin, Frédéric Moisy et Marc Rabaud, tous deux professeurs à la Faculté des Sciences (Laboratoire FAST).

Toutes nos pensées accompagnent sa famille dans cette épreuve.