Laurent Gaudens, au service de la beauté universelle

Laurent Gaudens est diplômé d’un « Master Méthodes Informatiques Appliquées à la Gestion des Entreprises » (MIAGE). A l’âge de 4 ans, il est brûlé à 60% par l’alcool d’un barbecue. Il ne se laisse pas abattre et surtout, il conserve une vraie estime de lui-même. Son tempérament lui permettra d’être directeur IT dans des grands groupes puis de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale avec Emerit Consulting, cabinet de conseil spécialisé dans les projets CRM. Régulièrement sollicité pour témoigner de son parcours, il fonde l’association Burns & Smiles. Depuis 2 ans, Laurent Gaudens a fondé Dulcenae, un institut de bien-être avec un positionnement « inclusif » capable d’accueillir tout le monde, y compris ceux qui ont un corps qui a été abimé par un handicap, une brulure, un problème de peau ou encore une maladie par exemple le cancer.

Comment êtes-vous arrivé à l’Université Paris-Saclay ?

Je voulais faire de l’informatique comme l’IUT d’Orsay était réputé, j’ai rejoint l’Université Paris-Saclay. Je recherchais avant tout un diplôme efficace sur le marché du travail. Finalement en sortant de l’IUT, j’ai eu envie de poursuivre mes études pour approfondir certains sujets qui m’intéressait. Je me suis donc inscrit à la Faculté des Sciences où je suis diplômé d’un Master 2 « Méthodes Informatiques Appliquées à la Gestion des Entreprises » (MIAGE).

Gardez-vous de bons souvenirs de vos années à Paris-Saclay ?

Mon arrivée à Paris-Saclay a coïncidé avec le départ de chez mes parents, cela a été une vraie étape dans ma vie ! Je garde surtout le souvenir d’un campus très verdoyant au cœur de la nature ce qui était vraiment agréable. J’ai pu pleinement en profiter car j’avais une chambre en Cité U au cœur du campus d’Orsay !

Après votre Master 2 MIAGE, vous êtes rentré chez PSA Peugeot Citroën ?

J’ai été embauché chez PSA Peugeot Citroën en effet, comme chef de projet technologie de l’information (ou IT « Information Technology »). J’y suis resté plus de 6 ans. J’ai fini par rejoindre Bouygues Telecom, qui était à l’époque un nouvel opérateur et qui fonctionnait en mode start-up. En 3 ans, j’ai pu y faire mes armes de directeur IT cette fois-ci. Surtout, j’ai découvert les outils CRM (Customer Relationship Management ou outils pour la gestion de la relation client), qui faisaient leur apparition dans le domaine de l’IT. Cela a vraiment influencé la suite de ma carrière.

Vous avez fondé ensuite EMERIT Consulting, qui signe le début de votre aventure entrepreneuriale ?

J’ai créé EMERIT Consulting en 2003 qui est un cabinet spécialisé dans le conseil et l'accompagnement des projets CRM des entreprises, avec une dimension « Assistance Maitrise d’Ouvrage » (AMOA) mais aussi marketing & communication.

Peut-on revenir sur l’aventure de l’association Burns & Smiles ?

L’association est partie d’un constat : on ne voit presque jamais de grands brûlés dans la rue. Pourtant il y a presque 400 000 personnes brulées par an et comme les brulures laissent des cicatrices qui ne disparaissent jamais totalement, on devrait voir des brulés régulièrement.

En fait, les brulés se cachent du regard des autres et sont dans l’isolement. Au-delà de l’isolement il y a aussi du rejet social, de la discrimination sociale mais aussi professionnelle. J’ai toujours été en contact avec les clients dans ma carrière mais c’est une chance inouïe que je dois à mes parents et à moi-même. L’adolescence a été une période compliquée, notamment avec les premiers amours, mais j’en suis sorti sans trop de dégâts car je n’ai jamais perdu confiance en moi.

L’association Burns & Smiles que j’ai fondé en 2013 a donc pour but de lutter contre l’isolement des personnes brûlées tout en les aidant à se re-socialiser.

On a 4 missions :

  • Informer, notamment avec notre groupe Facebook qui rassemble uniquement des personnes brulées qui peuvent poser toutes leurs questions avec les membres de la communauté qui répondent ;
  • Sensibiliser, autrement dit développer l’estime de soi des personnes brulées et familiariser le grand public aux personnes brulées et aux difficultés qu’elles peuvent rencontrer ;
  • Soutenir, car l’isolement donne l’impression que l’on est le seul brulé au monde ;
  • Accompagner financièrement, juridiquement et administrativement notamment après l’accident car la personne affaiblie doit faire face à des démarches souvent très chronophages. Bien sur l’accompagnement est au long cours et l’association s’attache au retour à l’emploi des personnes brulées.

Vous avez signé un magistral court-métrage de sensibilisation du grand public envers les grands brulés avec la campagne « Halloween » ?

Crédit photo : Burns & Smiles

Cela reste un très bon souvenir car nous avons réalisé le court-métrage avec l’agence TBWA et nous avons remporté de très nombreux prix, de Paris à Cannes et de New-York à Shanghai. En 3’50 minutes, on a fait passer un message sans précédent qui matérialise le combat invisible des grands brulés en proposant de suivre un homme brûlé au visage, le temps d’une nuit d’Halloween. Il se fond dans la masse, après s’être privé de sortie dans la peur du jugement de l’autre. Alors que tout le monde pense qu’il porte un masque, il ose enfin être à visage découvert. Le film porte un message profond mais il est léger et plein d’humour ! https://www.youtube.com/watch?v=-ZykdbjZ6hw

Pouvez-vous nous présenter Dulcenae votre nouvelle aventure entrepreneuriale ?

Crédit photo : Laurent Gaudens

Dulcenae est un institut de bien-être, pas comme les autres, entre institut de beauté et spa mais avec un positionnement « inclusif ». Nous sommes capables d’accueillir tout le monde, y compris ceux qui ont un corps abimé par un handicap, un problème de peau (acné, psoriasis, vitiligo, brulure), une maladie (un mal de dos, un surpoids ou encore un cancer). Nous avons eu la chance de remporter le grand prix de l’édition 2017 du concours « La Fabrique Aviva ». Au-delà de la dotation financière qui nous a permis d’avancer rapidement dans la conception de l’Institut et des protocoles de soins, La Fabrique Aviva nous a fait bénéficier d’une réelle visibilité auprès du public et des investisseurs. Crédibilité, légitimité et exposition médiatique sont ainsi venus s’ajouter au bénéfice du gain des 50 000 € ».
De manière très concrète et pour ne donner que quelques exemples, l’institut est accessible en fauteuil roulant, nos tables de soins sont aussi longues que larges, les miroirs des coiffeuses peuvent être refermés si l’on ne souhaite pas se regarder, des petites ardoises permettent à une personne sourde et muette de communiquer facilement. Un aveugle peut aussi venir avec son chien-guide dans la cabine sans problème. Nous avons essayé de ne rien oublier et de faire en sorte que tout le monde trouve sa place.
Nous travaillons avec des socio-esthéticiennes c’est-à-dire des esthéticiennes qui ont complété leur formation par un double diplôme universitaire (DU) mêlant psychologie et médical. Elles savent gérer un massage avec une poche de stomie ou un cathéter, une épilation sur une peu très sèche ou un massage sur un cuir chevelu très abimé.

Quels sont les soins que vous proposez ?

Notre offre de services est classique, nous accueillons homme et femme. Sur notre carte, vous trouverez : soins et massages visage et corps, beauté des mains et des pieds, épilations et maquillage.
L’idée est de pouvoir apporter un soin esthétique qui contribue à faire grandir l’estime de soi. Par exemple, chez nous une femme qui a perdu ses cheveux peut arriver et retirer sa perruque ou son foulard sans appréhension du regard du personnel. On a une cliente qui avait, à cause de son cancer, une peau très sèche qui pelait, elle nous a expliqué qu’elle avait été refusée de plusieurs centres esthétiques qui expliquaient ne pas pouvoir assurer le soin correctement. Imaginez-vous, fixer un rendez-vous bien-être pour vous retrouver mal à l’aise, c’est un comble !
Au-delà de la prise en charge, nous adaptons nos soins à la maladie. Par exemple, les femmes sous traitement anti-cancéreux, dont les ongles sont fragilisés et nécessitent d'apposer un vernis spécial contenant du silicium ne sont pas obligées d'emmener un flacon avec elles et peuvent profiter d'une mise en beauté des mains comme n'importe qui.
Enfin, nous proposons des soins pour soulager la douleur notamment. Par exemple, une femme qui a un sein en moins, pourra venir chez nous en sachant qu’elle ne recevra pas de regard étonné ou curieux mais surtout on pourra lui proposer un massage adapté à ses cicatrices. Un cancer peut entrainer des irruptions cutanées, on sera capable de proposer une épilation sur mesure. Finalement nous participons à notre manière au bien-être mais aussi à la reconstruction et à la réappropriation du corps.

Vous avez développé une gamme de soin spécialement dédiée pour les personnes touchées par le cancer ?

J’ai souhaité travailler avec la marque de soins Ozalys https://www.ozalys.com/fr/ créée par une professionnelle de la « pharmacosmétique » qui a eu un cancer du sein en 2013. Elle s’est très vite rendu compte qu’elle ne trouvait plus de produits de beauté adaptés à ses besoins particuliers. Les traitements curatifs ont des effets secondaires indésirables, notamment une ultra-sensibilité olfactive et sensitive qui l’a empêché de continuer son rituel de soin quotidien et d’utiliser les produits de beauté dont elle avait l’habitude. Nous proposons un soin des mains, un soin des pieds, un soin réconciliant du cuir chevelu, un soin précieux du visage, un soin précieux pour le corps et même une leçon de maquillage correcteur ! https://app.flexybeauty.com/dulcenae/category/6662811857059840

Vous organisez régulièrement des ateliers rassemblant les femmes touchées par le cancer ?

Crédit photo : Boris Mvondo

Nous proposons des ateliers de bien-être en partage. Par exemple, le dernier atelier que nous avons organisé proposait de prendre soin de soi avec une leçon d’auto-massage du visage. Puis, un soin individuel en cabine. Enfin, une séance de maquillage et de pose de vernis. 

Nous avons aussi monté un atelier avec Awa Seck, créatrice de la marque « Les Moussors de Awa » qui propose des étoffes colorées à transformer en foulard pour la tête. Nos clientes viennent pour apprendre à nouer le foulard autour de la tête et de différentes manières en fonction du style recherché. https://www.lesmoussorsdeawa.com/

Crédit photo : Boris Mvondo

Nous travaillons avec deux associations partenaires : SKIN et Corps éloquents.

La première, SKIN permet aux femmes touchées par le cancer de rebondir après les traitements, des périodes qui peuvent être synonymes d’isolement et de profond désarroi. Skin propose des défis artistiques et des performances sportives à des binômes femmes / artistes ou sportives, autrement dit des expériences de dépassement de soi, puis restitue ces collaborations dans des lieux prestigieux, avant de les exposer sous forme photographique dans des hôpitaux. La récolte de fonds permet à Skin de développer sa médiation auprès d’un public toujours plus large et d’alerter l’opinion publique sur les enjeux personnels et sociétaux du cancer https://associationskin.org/

La seconde est l’association Corps éloquents qui promeut la pratique de la marche nordique, de la marche dynamique et de toutes les activités de bien-être liées à la marche aux personnes touchées par le cancer ou en rémission.

Plus que la dimension « bien-être » c’est la sortie du contexte médical qui compte aussi. Au-delà d’apporter un soin, Dulcenae procure du plaisir ! Nous sommes un lieu pour prendre soin du corps mais aussi de l'âme !

Interview de Sabine Ferrier
Chargée du réseau des diplômés de l’Université Paris-Saclay
Direction de la Formation et de la Réussite

Pour toute information sur le réseau alumni de l’Université Paris-Saclay, vous pouvez contacter Sabine Ferrier, chargée du réseau des diplômés à la Direction de la Formation et de la Réussite :
alumni.upsaclay@universite-paris-saclay.fr
01 69 15 33 29 (Bâtiment 330 campus d’Orsay).